Réponse : En 2021, la composante carbone a rapporté 8,2 milliards d’euros [1]. On estime que moins d’un quart des recettes de la composante carbone est consacré au financement de la transition et/ou à la compensation des ménages [2]. L’essentiel des recettes est alloué au budget général de l’État.
La composante carbone étant conçue comme une modalité de calcul des taxes intérieures de consommation (TIC), il est difficile de déterminer précisément le montant de ses revenus et de suivre l’usage qui en est fait. Ses recettes ne sont pas explicitement fléchées vers des dépenses publiques précises. Toutefois, son impact doit être compensé : la loi précise que « son augmentation [est] compensée, à due concurrence, par un allègement de la fiscalité pesant sur d’autres produits, travaux ou revenus » [3].
Pour les premières années, ce principe de compensation est respecté. En 2014, le nombre d’ayant droits des tarifs sociaux du gaz et de l’électricité est élargi [4]. En 2016, 3 milliards d’euros ont été mis à disposition des entreprises sous la forme de crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) et 1 milliard d’euros aux ménages sous la forme de taux réduits de TVA sur les travaux de rénovation énergétique [5]. En 2018, le gouvernement introduit le « Paquet solidarité climatique » pour aider les foyers modestes à payer leurs factures énergétiques et à réduire leur usage des énergies fossiles grâce à des investissements verts [6].
Malgré l’introduction du « Paquet solidarité climatique », l’écart se creuse entre les revenus de la composante carbone et les mesures compensatoires [7]. Le rehaussement du prix carbone et la convergence de la fiscalité du diesel avec celle du gazole représentent 3,7 milliards d’euros de revenus supplémentaires. Parallèlement, les dépenses des principales mesures de compensation mises en avant par le gouvernement n’augmentent que de 181 millions d’euros en tout. À partir de 2018, il manque donc 3,5 milliards d’euros pour compenser la hausse de l’impact de la composante carbone.
Ce fonctionnement est à comparer au Canada et à l’Autriche, où tous les revenus de la contribution carbone sont recyclés directement aux citoyens sous forme de revenu climatique. Ce système garantit la transparence de l’usage des revenus et assure la soutenabilité pour les ménages, sans sacrifier l’efficacité de la mesure pour réduire les émissions [8,9].
En bref : Moins d’un quart des revenus de la composante carbone est utilisé pour compenser les ménages ou pour investir dans la transition écologique. La loi prévoit que son augmentation est compensée à montant égale par des mesures diverses. Depuis son implémentation en 2014, ce principe est respecté car plusieurs mesures se sont succédé pour compenser son impact. Depuis 2018, l’augmentation du prix carbone est bien plus élevée que celle des mesures compensatoires. Le revenu climatique permettrait de respecter la loi et de garantir la transparence quant à l’usage des revenus.
- KAHN, Philippe, MARITON, Hervé et PASCAL, Michel. 2022. Les outils de la régulation économique du carbone. Lien
- Avis de l’ADEME. 2019. La contribution climat solidarité. Lien
- Légifrance. 2023. Code de l’énergie, article L100-2, tel que modifié par la Loi transition énergétique et croissance verte (LTECV) de 2015. Lien
- Assemblée nationale. 2013. Projet de loi de finances pour 2014. Lien
- ROGISSART, Lucile, POSTIC, Sébastien et GRIMAULT, Julia. 2018. La composante carbone en France : fonctionnement, revenus et exonérations. I4CE. Lien
- Gouvernement. 2017. Paquet solidarité climatique. Lien
- Sénat. 2017. Avis présenté au nom de la commission des affaires économiques (1) sur le projet de loi de finances pour 2018. Tome II – Écologie, développement et mobilité durables. Section A. 5. (page 19). Lien
- Voir Laser Talk sur la redistribution au Canada. Lien
- Voir Laser Talk sur la redistribution en Autriche. Lien
Dernière mise à jour : 2024-05-17
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