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juillet 2020

Policy Brief

Policy Brief 229 185 Lobby Climatique Citoyen - CCL France

L’objectif de ce “Policy Brief” est de répondre à des questions des fonctionnaires de la Commission Européenne, qui, suite à des entretiens avec Citizens’ Climate Europe (CCE), ont demandé au groupe de démontrer plus précisément comment la politique de CCL pourrait s’intégrer dans le cadre existant des règlements européens.

Carbon Fee and Dividend in the European Union


Le Lobby Climatique Citoyen (CCL pour son nom anglais) est une organisation mondiale et non partisane qui défend spécifiquement une contribution carbone dont les revenus sont distribués comme dividende aux citoyen.ne.s. Le groupe est presque entièrement composé de lobbyistes citoyen.ne.s bénévoles. Il est opérationnel depuis 2007 et est maintenant actif dans 60 pays dans le monde. En Europe, le CCL s’adresse aux institutions de l’UE, tels que le Parlement européen et la Commission, par l’intermédiaire de CCE, ainsi qu’aux gouvernements nationaux par l’intermédiaire des sections locales de CCL (comme CCL France) dans 13 pays européens. Le CCL a le statut de société civile au sein du G7, du G20, de la CCNUCC et de la Banque mondiale. Il est également un partenaire stratégique fondateur de la Carbon Pricing Leadership Coalition, qui réunit des dirigeants du secteur public, du secteur privé et de la société civile pour étudier et promouvoir la tarification du carbone.

Chacun des groupes de CCL dans le monde doit adapter la solution de CCL aux circonstances uniques de leurs juridictions. Bien que les détails de ces propositions puissent varier, elles sont toujours basées sur quatre principes clés :

1) Un prix du carbone prévisible et en constante augmentation. Le développement et le déploiement d’un grand nombre de technologies et de processus nécessaires à la décarbonisation en profondeur nécessitent des investissements importants à long terme. Étant donné l’urgence de la crise climatique et le temps qu’il faudra pour que nombre de ces solutions deviennent viables et soient adoptées à grande échelle, ces investissements sont nécessaires dès maintenant. Toutefois, en l’absence d’un prix prévisible et en constante augmentation des émissions, les acteurs auront du mal à prévoir si et quand ces investissements seront rentables. Le système communautaire de plafonnement et d’échange de quotas d’émission (SCEQE) introduit un prix du carbone, mais la trajectoire à long terme de ce prix est difficile à prévoir et est sujette à des baisses occasionnelles. Cela s’explique en partie par le fait que les futurs prix des quotas du SCEQE ne dépendent pas seulement du plafond des quotas, mais aussi de la demande future de quotas de tous les participants au SCEQE, qui dépend à son tour d’un certain nombre de facteurs impossibles à prévoir avec précision. En outre, le moment où le plafond devrait devenir matériellement contraignant pour de nombreuses entreprises peut se situer en dehors de leurs cycles de planification normaux. De plus, le SCEQE ne s’applique qu’à environ la moitié des émissions de l’UE, l’autre moitié étant soit non tarifée, soit couverte par des systèmes hétérogènes de tarification au niveau national. Ainsi, pour garantir qu’un signal d’investissement clair et cohérent soit envoyé à tous les acteurs, le CCL recommande un prix minimum du carbone pour l’ensemble de l’économie qui augmente régulièrement à un rythme préétabli.

2) Redistribuer les recettes aux citoyen.ne.s de manière équitable et transparente. Que la décarbonisation soit réalisée par le biais d’un prix du carbone ou d’autres réglementations, les coûts auxquels sont confrontés les producteurs augmenteront à mesure que la décarbonisation s’approfondira. En fin de compte, une grande partie de cette hausse sera répercutée sur les consommateurs sous la forme de prix plus élevés. Des mesures visant à les protéger sont donc nécessaires pour garantir que les politiques climatiques conservent un soutien politique. Le meilleur moyen d’y parvenir est de restituer aux citoyen.ne.s toutes les recettes nettes provenant de la contribution carbone sous la forme d’un dividende mensuel. Dans l’hypothèse d’un dividende forfaitaire versé de manière égale à tous les citoyen.ne.s d’un pays, la contribution carbone et le dividende seraient progressifs, la majorité des ménages en tirant un bénéfice net. Comme on l’a vu au Canada, où une politique similaire a été adoptée, la réception régulière de dividendes sur le carbone non seulement préserve le pouvoir d’achat des consommateurs, mais augmente également l’intérêt des électeurs pour la préservation de la politique. Cela dit, un dividende carbone ne résoudra pas entièrement tous les problèmes causés par les politiques climatiques, en particulier ceux qui découlent de problèmes structurels plus profonds. Toutefois, cela est vrai pour toute politique climatique considérée isolément. En réalité, une politique de contribution et de dividende sur le carbone peut et doit être complétée par d’autres politiques, qui ne doivent pas nécessairement être liées aux revenus de la contribution carbone.

3) Un ajustement carbone aux frontières (ACF). À mesure que le prix intérieur des émissions augmentera, le risque que les entreprises cherchent à importer de l’étranger une plus grande partie de leurs biens et matériaux à forte intensité de carbone augmentera, provoquant ce que l’on appelle une fuite de carbone. Toutefois, pour réussir à atténuer le changement climatique, l’UE ne peut ignorer son impact mondial et doit donc mettre en œuvre des politiques qui encouragent les entreprises à réduire les émissions de leur production nationale et de leurs importations. Elle doit également trouver des moyens d’encourager des efforts d’atténuation équivalents à l’étranger, et un ACF est l’un des outils pour y parvenir.

4) Simplicité. En ce qui concerne la tarification du carbone, la simplicité signifie un prix du carbone unique, applicable à l’ensemble de l’économie et facturé le plus en amont possible. Une politique plus simple crée moins de charges administratives et rend les obligations plus claires pour ceux à qui elles appliquent. Une telle politique est également plus transparente et plus crédible, ce qui est essentiel. Finalement, la simplicité permet aux autres pays de suivre plus facilement l’exemple de l’UE, en particulier ceux qui n’ont pas les ressources et les institutions nécessaires pour mettre en œuvre une approche plus complexe. 

L’UE a déjà mis en place de nombreuses politiques climatiques depuis longtemps grâce à son leadership en matière d’action climatique. Toutefois, cela rend difficile l’adoption d’une politique unique et globale d’une contribution et d’un dividende carbone. C’est pourquoi le Policy Brief propose des moyens d’intégrer les principes fondamentaux de CCL dans les cadres existants de l’UE, en mettant particulièrement l’accent sur la directive sur la taxation de l’énergie (DTE), le SCEQE, le règlement sur le partage de l’effort (RPE) et la proposition de la Commission européenne pour un ACF. Cette liste de recommandations n’est pas exclusive. Elle vise simplement à illustrer qu’il est possible d’intégrer les principaux aspects d’une contribution et d’un dividende carbone dans les politiques existantes de l’UE. 

Les 3 options présentées sont les suivantes : (i) transformer l’ETD en un prix du carbone applicable à l’ensemble de l’économie ; (ii) introduire un prix plancher dans le SCEQE et l’étendre progressivement à tous les grands secteurs ; et (iii) introduire un prix plancher dans le SCEQE et permettre une conversion bidirectionnelle (c’est-à-dire une fongibilité) entre les quotas du SCEQE et les allocations annuelles d’émissions des États membres dans le cadre du RPE. Dans chaque cas, un ACF serait adoptée, et son niveau de redevance serait lié au prix minimum du carbone de l’UE établi via la DTE ou le plancher du SCEQE.

Le « Green Deal » vise à placer le changement climatique au cœur de toutes les grandes politiques de l’UE, et la Commission a élaboré un plan ambitieux pour y parvenir dans les plus brefs délais. Toutefois, une fois les négociations sur le « Green Deal » terminées, il est probable que l’appétit politique pour d’autres réformes à grande échelle soit faible pendant des années, voire des décennies. Par conséquent, les décisions prises aujourd’hui pourraient largement décider si l’UE parvient ou non à atteindre ses objectifs climatiques. Et, en tant que leader mondial de l’action climatique, les décisions de l’UE auront également des répercussions mondiales, fixant effectivement un plafond à l’ambition climatique dans de nombreux pays. Il est donc essentiel que les réformes du « Green Deal » soient aussi ambitieuses et efficaces que possible, même lorsque cela est politiquement difficile.

À cet égard, il convient d’envisager sérieusement la mise en place d’une contribution et d’un dividende sur le carbone. Ils peuvent fournir un signal fort de prix et à long terme stimuler l’investissement dans la décarbonisation, tout en protégeant les consommateurs et en renforçant le soutien politique en faveur de cette politique. En combinaison avec un ajustement carbone aux frontières, elle permettrait de réduire les émissions de l’UE liées à la production et à la consommation. Bien qu’elle ne doive pas – et ne devrait d’ailleurs pas – être la seule politique climatique adoptée, les modèles économiques indiquent qu’elle serait particulièrement efficace. Et, comme l’illustre le Policy Brief, il est tout à fait possible de l’intégrer dans les cadres existants de l’UE.
Auteurs

Le “Policy Brief” a été rédigé en Juillet 2020 par une équipe de membres de CCL France et d’autres groupes européens de CCL. L’effort a été coordonné par Citizens’ Climate Europe (CCE), l’entité représentant CCL au niveau européen.

Décryptage du deal européen – La bataille commence pour le climat

Décryptage du deal européen – La bataille commence pour le climat 1024 598 Lobby Climatique Citoyen - CCL France

Article de Réseau Action Climat concernant le green deal européen.

https://reseauactionclimat.org/decryptage-deal-europeen-bataille-commence-pour-climat/

Europe : le traité sur l’énergie fait obstacle au climat

Europe : le traité sur l’énergie fait obstacle au climat 960 640 Lobby Climatique Citoyen - CCL France

Tribune

LIBERATION

Par Un collectif — 7 juillet 2020 à 17:21

Imaginez que vous viviez dans un pays où les citoyens demandent des mesures drastiques pour lutter contre le changement climatique. Imaginez que le Parlement et le gouvernement aient élaboré un plan audacieux pour éliminer progressivement les combustibles fossiles dans un délai qui permette de maintenir le réchauffement climatique sous la barre de 1,5 °C. Imaginez enfin que les fonds de relance de la crise du Covid-19 soient utilisés pour accélérer la transition énergétique. Mais soudain, les industries énergétiques décident de tout remettre en cause, décident d’attaquer l’Etat et de lui réclamer des milliards d’euros de dédommagement. Le tout sur la base d’un accord obscur, le traité sur la charte de l’énergie (TCE). Cette histoire semble absurde ? C’est pourtant un risque bien réel.

Nous, eurodéputés de plusieurs pays et de différents groupes politiques, partageons une profonde inquiétude à propos de ce TCE, dont les négociations pour une «modernisation» ont commencé ce lundi 6 juillet. Plusieurs pays européens ont déjà fait l’expérience du caractère profondément antidémocratique et antiéconomique de cet accord international, conçu avant tout pour protéger le secteur des énergies fossiles.

Le TCE limite la capacité de l’Union européenne et de ses Etats membres à modifier les réglementations et les politiques dans le secteur de l’énergie. L’Allemagne a été poursuivie à deux reprises par la multinationale énergétique suédoise Vattenfall. Dans le premier cas, l’entreprise a réussi à assouplir les normes environnementales imposées à une de ses centrales électriques au charbon près de Hambourg. Aujourd’hui, elle réclame plus de 6,1 milliards d’euros pour le manque à gagner lié à deux de ses centrales nucléaires à la suite de l’abandon progressif du nucléaire allemand décidé après la catastrophe de Fukushima. De tels cas pourraient facilement se reproduire lors de l’élimination progressive des combustibles fossiles.

D’autant que la simple menace d’une plainte peut suffire à ce que les Etats renoncent à des mesures ambitieuses pour mettre en œuvre leurs engagements en matière de climat. En 2017, une entreprise canadienne, Vermilion, a menacé le gouvernement français de poursuites dans le cadre du TCE s’il adoptait une loi mettant fin à l’exploration et à l’extraction des combustibles fossiles sur l’ensemble du territoire français d’ici à 2040. A la suite de ces pressions, la loi finale a été modifiée, permettant de continuer à délivrer des permis d’exploitation pétrolière.

Le maintien de la protection des investissements dans les combustibles fossiles augmente considérablement le coût de la transition énergétique pour les contribuables et compromet donc directement l’objectif de neutralité climatique défini dans le «Green Deal», lancé par la présidente de la Commission européenne. Les Pays-Bas ont été mis en demeure, il y a quelques semaines, de régler un différend fondé sur le TCE par la société allemande Uniper, pour un montant pouvant atteindre 1 milliard d’euros, après la décision du pays de supprimer progressivement le charbon pour la production d’électricité. Il faudra sans doute des années pour résoudre un tel cas d’arbitrage, qui sèmera entre-temps l’insécurité parmi les législateurs d’autres pays au risque d’affaiblir ou de retarder les politiques climatiques.

Bien qu’ils soient encore sous le choc de la crise du Covid-19, les pays pourraient connaître un nouveau pic de poursuites de la part des investisseurs en raison des mesures exceptionnelles adoptées ces derniers mois. L’Espagne avait déjà été fortement ciblée après la dernière crise financière. Ce pays est, à ce jour, l’Etat le plus attaqué dans le cadre du TCE, accumulant un total de 48 plaintes, dont 16 ont déjà été résolues en faveur de l’investisseur pour plus de 1 milliard d’euros, soit sept fois le budget que l’Espagne s’est engagée à verser au Fonds vert des Nations unies. Mais il reste 28 réclamations non résolues, ce qui pourrait faire grimper la facture des contribuables espagnols jusqu’à 8 milliards d’euros.

Toutes ces plaintes contre les Etats membres de l’UE devraient démontrer à la Commission européenne que le traité sur la charte de l’énergie est un accord archaïque, incompatible avec la réalisation des objectifs de l’accord de Paris sur le climat. Pour y parvenir, il faudrait exclure la protection des énergies fossiles du texte. En outre, le mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats (ISDS), qui permet aux entreprises de réclamer des montants d’indemnisation colossaux, doit être supprimé ou fondamentalement réformé et limité. Mais aucune de ces propositions n’est portée par les signataires du TCE – y compris l’UE. Cela signifie clairement dès le départ que la réforme ne permettra pas de rendre le TCE compatible avec nos engagements en matière de climat ; tout comme elle ne répondra pas aux préoccupations sur l’incompatibilité du mécanisme d’arbitrage entre investisseurs et Etats du TCE avec le droit européen. C’est pourquoi nous demandons instamment à l’UE et aux Etats membres de rehausser l’ambition des propositions qu’ils portent dans le cadre des négociations afin de remédier à ces lacunes, ou d’explorer des options permettant de se retirer conjointement du TCE en cas d’échec des négociations.

Signataires : Marie Arena, S & D (Belgique), Michael Bloss Greens (Allemagne), Saskia Bricmont Greens (Belgique), Pascal Canfin, Renew (France), Anna Cavazzini Greens (Allemagne), Mohammed Chahim S & D (Pays-Bas), Pascal Durand Renew (France), Agnes Jongerius S & D (Pays-Bas), Aurore Lalucq S & D (France), Bernd Lange S & D (Allemagne), Javi Lopez S & D (Espagne), Helmut Scholz GUE (Allemagne), Ernest Urtasun Greens (Espagne), Kathleen Van Brempt S & D (Belgique).

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