Laser talk 4 – Les impacts :
Question : Une contribution carbone n’est-elle pas mauvaise pour l’économie ?
Réponse : Une contribution carbone bien conçue est bénéfique pour l’économie. Tout compris, le coût de l’inaction climatique est bien supérieur au coût de la contribution carbone. Couplée à un revenu climatique, la contribution carbone aura un impact positif sur notre économie. Et cela sans compter les bénéfices d’une réduction de la pollution de l’air par les énergies fossiles.
La majorité des économistes soutient la tarification du carbone. Dans un sondage réalisé en 2009, 92 % des économistes sondés préfèrent la tarification du carbone à d’autres mesures et 98 % estiment qu’elle favorise l’efficacité énergétique et l’innovation verte [1]. En 2019, plus de 3500 économistes académiques dont 28 lauréats du prix Nobel d’économie ont publié une lettre ouverte soutenant explicitement une contribution carbone redistribuée à 100% sous forme de revenu climatique [2]. En Europe, une lettre ouverte soutenant la tarification du carbone a été signée par plus de 1700 économistes académiques [3]. Un sondage concernant plus de 400 experts du domaine répartis dans 39 pays montre qu’il y a un consensus très fort en faveur d’un prix du carbone moyen plus élevé que celui actuel au niveau mondial [4]. Enfin, la commission internationale Blanchard-Tirole réunissant 26 experts économistes donne « une approbation sans réserve d’une tarification du carbone bien conçue » [5].
Les cas concrets d’application montrent qu’une tarification du carbone bien conçue n’entrave pas l’économie. En Colombie-Britannique, qui a une contribution carbone depuis 2008, l’économie se porte tout aussi bien [6]. Une analyse des pays de l’UE qui ont implémenté un prix du carbone a montré qu’il augmente légèrement le PIB et favorise l’emploi [7].
Et c’est sans considérer les économies réalisées en évitant les dommages causés par les énergies fossiles. Selon une étude très récente, chaque tonne de CO2 émise aujourd’hui coûtera à l’économie future environ 185 $ [8]. C’est 3,6 fois plus que la dernière estimation du gouvernement américain, qui était à 51 $ par tonne de CO2. Le rapport du GIEC souligne que le coût économique de la transition écologique est minime comparé au bénéfice de contenir le réchauffement climatique en dessous de 2°C [9].
Il faut aussi compter les coûts engendrés par la pollution de l’air, en grande majorité causée par les combustibles fossiles. Une commission d’enquête du Sénat s’est penchée sur les coûts de la pollution de l’air en France [10]. La pollution de l’air engendre des coûts sanitaires directs évalués à 3 milliards d’euros par an a minima, et des coûts sanitaires indirects estimés entre 68 et 97 milliards d’euros par an. Les coûts non sanitaires (baisse de rendements agricoles, de perte de biodiversité et de dégradation des bâtiments) sont estimés à 4 milliards d’euros par an a minima.
Lorsque quelqu’un prétend qu’une contribution carbone ralentit l’économie, il ne tient pas compte du coût de l’inaction climatique, du revenu climatique qui dynamise l’économie et des coûts évités de la pollution de l’air.
En bref : Une tarification du carbone bien conçue est bonne pour l’économie. Il y a un large consensus en faveur de la tarification du carbone parmi les économistes. Les cas concrets d’application au Canada et en Europe montrent que le PIB et l’emploi augmentent légèrement. Il faut aussi compter les dommages évités du changement climatique et de la pollution de l’air, qui ont un coût économique considérable.
[1] HOLLADAY, J. Scott, HORNE, Jonathan et SCHWARTZ, Jason A. 2009. Economists and climate change: Consensus and open questions. Institute for Policy Integrity. Policy Brief No. 5. Lien
[2] Climate Leadership Council. 2019. Economists’ Statement on Carbon Dividends. Lien
[3] European Association of Environmental and Resource Economists (EAERE). 2019. The Economists’ Statement on Carbon Pricing. Lien
[4] University of Copenhagen Pressroom. 2021. Survey: Strong consensus among experts for higher CO2 prices. Lien
[5] BLANCHARD, Olivier et TIROLE, Jean. 2021. Les grands défis économiques. France Stratégie. Lien
[6] BERNARD, Jean-Thomas et KICHIAN, Maral. 2021. The Impact of a Revenue-Neutral Carbon Tax on GDP Dynamics: The Case of British Columbia. The Energy Journal, International Association for Energy Economics. Lien
[7] METCALF, Gilbert E. et STOCK, James H. 2020. The Macroeconomic Impact of Europe’s Carbon Taxes. National Bureau of Economic Research. Document de travail 27488. Lien
[8] RENNERT, Kevin et al. 2022. Comprehensive evidence implies a higher social cost of CO2. Nature. Lien – Billet de blog lien
[9] GIEC. 2022. AR6 WG3. Section C.12. Lien
[10] AÏCHI, Leila. 2015. Pollution de l’air : le coût de l’inaction. Rapport du Sénat pour le groupe Écologiste. Lien